La normalité physique de Jeanne
On s'est toujours interrogé sur la " normalité " physique de Jeanne, et on a envisagé plusieurs hypothèses pour tenter d'expliquer ce qui reste un mystère pour nombre de personnes.
On en a fait un homme (Jehan d'Orléans), un(e) hermaphrodite, un garçon manqué, une homosexuelle, une vierge demeurée...
Et si tout simplement elle était absolument " normale ", avec des coups de cœur et des envies ? une fille certainement en avance sur son temps, parce que justement née différemment des autres. Il est bien évidement plus facile d'assumer sa différence quand on est né noble que née dans la roture, voire dans la plèbe.
Nous allons dans cet article nous interroger plus avant sur sa réelle condition physique (et sexuelle).
On peut rappeler quelques données du problème en préambule :
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En 1428, elle est assignée devant l'officialité de Toul pour une rupture de promesse de mariage, ce qui implique qu'elle devait posséder un minimum d'attraits physiques pour qu'un homme se plaigne de la perdre, et ait pu envisager une union.
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On peut retenir le témoignage du médecin qui parlera de son " étroitesse ". Ce qui implique qu'elle possède bien un vagin normalement constitué, le médecin évoquant une palpation " entre les reins ", c'est à dire menée assez profondément.
Malgré son étymologie grecque, l’hymen est, en anatomie, une invention récente : chez les grands médecins de l’Antiquité, d’Aristote (384-322 av. J.-C.) à Galien (129-201), on ne trouve aucune référence à une membrane qui fermerait partiellement l’entrée du vagin. À l’époque moderne, les grands noms de la médecine sont tout aussi dubitatifs : Ambroise Paré (v. 1510-1590) ou André Du Laurens (1558-1609) considèrent l’hymen comme une fiction ou une rêverie ; Buffon (1707-1788) affirme dans son Histoire naturelle que cette membrane n’est qu’une invention des hommes qui « ont voulu trouver dans la Nature ce qui n’était que dans leur imagination ». ( Pauline Mortas - Université Paris 1 Panthéon Sorbonne )
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Elle subira plusieurs " examens " visant à vérifier sa virginité, ce qui semble impliquer une certaine conformité de ses organes externes à son sexe déclaré. Mais la remarque énoncée ci-après à propos des ordalies nous parait contredire ces examens physiques...
L'uroscopie est une méthode de diagnostic fort en vogue à cette époque, censée déterminer tous les maux à la simple observation des urines du patient ! le " médecin " comparant leurs couleur et consistance à un " nuancier " pré-établi...
Une vierge se devant d'avoir l'urine " claire et brillante ", il était très aisé dans ce cas d'établir la virginité du sujet.
Rappelons en outre que la plupart du temps, le patient n'était même pas présent, s'étant contenté de faire porter une fiole au spécialiste.-
Il faut savoir qu'à l'époque concernée, les " tests " de virginité n'avaient rien de médical, ni même de vraisemblable... Le test étant essentiellement constitué d'une ordalie, un jugement de Dieu... Alors on observait les tétons, qui se devaient de pointer vers le haut chez la vierge...!
Dans d'autres cas, l'on faisait boire à la " patiente " une tisane diurétique, après quoi elle devait se retenir d'uriner pendant une heure...
Mais l'examen décisif était encore plus extraordinaire, consistant à faire boire la demoiselle à l'aide d'un récipient en forme de corne... une vierge ne devant jamais perdre une goutte de sa boisson ! Et même si l'examen de virginité avait porté sur la constatation de la présence ou non d'un hymen, inconnu à cette époque rappelons-le, on pourrait également douter de la " technicité des examens médicaux " dans la mesure où la pratique de certains sports violents, dont l'équitation et l'escrime, entraînent généralement une rupture de l'hymen ! Jeanne ne monte pas en amazone, et à cette époque, le cavalier était debout sur les étriers et non assis sur sa selle, ce qui amenait notre cavalière à avoir constamment les cuisses largement écartées... Les premiers examens seront menés par Yolande d'Anjou, juge et partie dans cette affaire, et vraisemblablement très encline à déclarer la demoiselle vierge...
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Avant ces premiers " examens ", on devra lui donner des soins pour son " entrejambe " meurtrie par la longue chevauchée qu'elle vient d'assumer !
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Rappelons que la médecine légale actuelle est dans l'incapacité de différencier une femme vierge d'une femme qui ne l'est plus. Et l'on sait que certaines petites filles n'ont pas d'hymen à la naissance, et que des femmes possèdent encore un hymen après une maternité...
Dans quel état aurait-on trouvé celle qu'on appelle la Sainte Vierge après la naissance de son fils ? -
On citera son aménorrhée dont témoigneront certains. ( " Elle n'avait point le mal secret des femmes " ) .
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Lors du départ de Vaucouleurs, on évoquera son aspect de " page ", c'est-à-dire plutôt androgyne.
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Son écuyer parlera de sa semi nudité, et des " tétins qu'elle avait fort beaux ". D'Alençon également !
A une connaissance qui l'interroge, elle répond qu'elle aura 3 enfants, un roi, un pape et un empereur. Ce qui peut signifier qu'elle se sait féconde...
Certaines sources évoquent l'absence de pilosité intime de Jeanne... Les matrones l'examinant en auraient été surprises ! mais on se doit de savoir que l'épilation intime était une coutume fort ancienne, ( on la trouve chez les Egyptiens ) que les chevaliers avaient rapportée des croisades pour leurs épouses. Les dames d'un certain niveau y avaient recours ; voir l'article " Petite Histoire de dépilatoires " ou bien l'étude précitée de Laurence Moulinier
Concernant la prétendue virginité contrôlée à plusieurs reprises, on trouve dans l'ouvrage de William Caxton "The cronycles of Englonde with the Fruyte of Times (Pars 7) le passage suivant: "And she was judged by the lawe to be brent ; and then she sayd she was with chylde ; wher by she was respited a whyle"...
Et Polydore Virgilius dans son Historia Anglica s'exprime de même : " Simulavit se gravidam esse ".
L'uroscopie, une science en vogue au Moyen âge.
Laurence Moulinier, dans son étude " Virginité, maternité et maux du corps féminin au prisme de l'uroscopie médiévale ", nous décrit cette pratique, science censée diagnostiquer la plupart des maux, y compris la perte de la virginité ou la grossesse par l'analyse essentiellement visuelle des urines de la patiente. Lire l'article complet en ligne.
Une autre étude intéressante, celle d' Edmond Locard, "Recherche de la virginité au moyen âge et la Renaissance" . In: Bulletin de la Société d'anthropologie de Lyon, tome 22, 1903. pp. 133-136; Lire l'article.
Comment aurait-on pu rechercher en 1429 un hymen sur Jeanne puisque la première description de cet organe par Andreas Vesalius date de 1561. Andreas Vesalius, ou André Vesale en français, de son vrai nom Andries Wyting van Wesel, est considéré comme le plus grand anatomiste de la Renaissance, voire le plus grand de l'histoire de la médecine.
Concernant l'hypothétique examen de l'hymen, rappelons en outre qu'il ne serait alors que visuel ! Laurence Moulinier, dans son étude pré-citée, nous conte l'anecdote suivante:
" S'étant retrouvée enceinte, une abbesse accouche d'un fils sans douleur aucune, et second miracle, elle est déclarée simple pucelle suite à l'inspection intime, par six Dames, à laquelle elle dut se soumettre "
Le lecteur trouvera dans la thèse soutenue le 27 juin 1827 par Célestin Gaullier intitulée "De l'hymen" de plus amples informations
Le témoignage de Catherine le Royer lors du procès de réhabilitation est tendancieux... En parlant de l'impatience de Jeanne de partir pour Chinon, elle dira : "le temps lui pressait comme à une femme enceinte" (et erat tempos sibi grave ac si esset mulier pregnans)... Mais bien justement, Jeanne n'était-elle point enceinte ? C'est ce que nous évoquons dans un autre chapitre.
Les hypothèses
Plusieurs hypothèses d'anomalies physiques ont été évoquées par la frange traditionaliste pour tenter d'expliquer cette
" anormalité " :
Difficile en effet de faire croire qu'une fille normalement constituée demeure vierge, déjà dans sa jeunesse, puis dans son parcours militaire au milieu d'hommes rustres, puis en prison, soumise à ses geoliers. Alors on brode, elle avait les lèvres soudées, elle n'avait pas de vagin, en somme, elle n'était sexuellement pas normale ! Ce n'est plus la volonté de rester vierge qui tient Jeanne, c'est simplement une incapacité physique de copuler !
Les diverses hypothèses médicales
Klinefelter
Rokitansky Kuster Hauser
Turner
Klinefelter :
Que l'on trouve également sous les dénominations suivantes
- Syndrome de Klinefelter
- Mâles XXY
- Polygonosomie XXY
- Caryotype 47, XXY
" Critères de diagnostic / définition "
Le syndrome de Klinefelter se définit par la présence
chez des sujets de phénotype masculin, d'un chromosome X supplémentaire. Le caryotype s'écrit 47,XXY.
Le seul signe constant est l'azoospermie liée à la sclérose des tubes
séminifères et responsable de la stérilité.
Incidence
Le syndrome de Klinefelter est une des anomalies des chromosomes sexuels
la plus fréquente avec une prévalence de 1/600 à 1/700 nouveau-nés de
sexe masculin. La fréquence augmente avec l'âge maternel.
Description clinique :
Comme dans la population générale, il y a une grande variation phénotypique dans le syndrome de Klinefelter. Il est cependant possible de
dresser un tableau clinique commun.
La grossesse n'est pas émaillée de complications, le phénotype est
habituellement normal à la naissance et le reste jusqu'à la puberté.
A la puberté qui se fait à un âge habituel, les testicules restent
petits et mous et les caractères sexuels secondaires, en particulier la
pilosité, peuvent être peu développés.
Le morphotype est variable. Certains sujets sont longilignes avec une
taille supérieure à celle des membres de la fratrie.
La stérilité est la règle par fibrose des tubes séminifères et
azoospermie et le diagnostic du syndrome n'est bien souvent porté que
lors du bilan d'une stérilité.
Le développement mental des sujets 47,XXY est dans les limites de la
normale. Il y a cependant un risque supérieur à la population générale de difficultés d'apprentissage, en particulier de la parole, du
langage et de la lecture : la dyslexie se rencontre chez plus de 50 %
des garçons XXY.
Les performances motrices peuvent être diminuées. Maladresse,
incoordination, trouble de l'équilibre font que les sports individuels
sont plus conseillés que les sports d'équipe.
Sur le plan psychologique, on note avec une plus grande fréquence,
timidité, immaturité, faible confiance en soi ou impulsivité.
Certains sujets XXY ont tendance à rester en dehors des activités de
groupe.
Le comportement sexuel est habituellement hétérosexuel.
Rokitansky Kuster Hauser:
Critères de diagnostic / définition
Le syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser (MRKH) est
caractérisé par une aplasie congénitale de l'utérus et des deux
tiers supérieurs du vagin. Elle est soit isolée (type I), soit associée à d'autres malformations (type II ou association MURCS).
Incidence
L'incidence est estimée à une femme sur 4500.
Description clinique
Le signe d'appel principal est une aménorrhée
primaire. Le développement des caractères sexuels secondaires
et les organes génitaux externes sont normaux. En revanche, le vagin
est réduit à une cupule plus ou moins profonde. Les ovaires sont
normaux et fonctionnels et le statut hormonal normal. Le caryotype est
46,XX, sans anomalie chromosomique visible. Les manifestations phénotypiques du MRKH peuvent se chevaucher avec celles d'autres syndromes
ou malformations, cela requiert donc de préciser les limites de ce
syndrome ainsi que les diagnostics différentiels se posant devant une
femme présentant une aménorrhée primaire avec des caractères sexuels
secondaires bien différenciés.
Turner
Critères de diagnostic / définition
Ce syndrome associe une anomalie du caryotype (typiquement
45,X0), une anomalie des ovaires et une petite taille.
Le syndrome de Turner est la conséquence visible de l'absence chez la
fille d'un chromosome sexuel X. On sait que la différenciation sexuelle
est sous la dépendance de deux chromosomes sexuels : X et Y.
Dans la combinaison génétique XY, le chromosome Y induit la
transformation de la gonade primitive en testicule. Le testicule est
responsable chez l'embryon de la transformation des voies génitales
indifférenciées en tractus génital mâle. Sans chromosome Y, pas de
testicule, donc pas de développement des canaux de Wolff, pas de régression des canaux de Muller et finalement évolution femelle, de
manière spontanée, du tractus génital.
Dans la combinaison génétique XX, le deuxième chromosome X tient sous
sa dépendance la différenciation de la gonade primitive en ovaire.
Sans ce deuxième chromosome X, la gonade primitive reste à l'état
indifférencié.
Dans le syndrome de Turner (X0) le phénotype est féminin (l'aspect extérieur est celui d'une fille) puisqu'il n'y a pas de chromosome Y mais
il n'y a pas d'ovaire puisqu'il n'y a pas de deuxième chromosome X.
Incidence
La fréquence du syndrome de Turner est de 1/2500
naissances de fille.
Description clinique :
Certaines anomalies morphologiques sont évocatrices :
visage un peu rond, palmures du cou rejoignant les épaules, nombreux
naevi sur la peau, thorax bombé en bouclier élargi avec des mamelons
hypoplasiques très écartés.
Le niveau intellectuel est le plus souvent normal.
La taille adulte varie sans traitement de 142 à 147 cm.
Par contre, une dernière " anomalie " n'a, à notre connaissance, jamais été envisagée : le vaginisme...
Le vaginisme
Le vaginisme est un dysfonctionnement sexuel assez fréquent, qui se
traduit par des spasmes involontaires des releveurs de l'anus, ce qui
rend la pénétration du pénis impossible ou très douloureuse ".
Généralement, toute pénétration ( doigt, tampon périodique ) est
difficile, douloureuse voire impossible
Le vaginisme est primaire s'il débute avec la vie sexuelle de la femme.
C'est la forme la plus fréquente. Lorsqu'il survient après une période
de vie sexuelle sans problème de pénétration, les causes organiques de
dyspareunie doivent être particulièrement recherchées.
Par définition, les organes génitaux sont normaux et indemnes de toute
pathologie mais à chaque tentative de pénétration, l'orifice vaginal
se referme par un mécanisme réflexe totalement involontaire des
muscles péri-vaginaux.
" Le vaginisme est à l'intromission du pénis ce qu'est le clignement de
l'œil à la pénétration du moucheron .
L'examen gynécologique est nécessaire pour éliminer une cause
organique (dyspareunie, hymen) mais il est souvent impossible, nécessitant une anesthésie générale.
Le vaginisme peut faire partie d'un phénomène plus complet de refus
voire de phobie de la sexualité, de frigidité mais souvent il
n'empêche pas la réponse sexuelle normale, excitation, lubrification et
orgasme produit par stimulation clitoridienne.
Les causes du vaginisme primaire
L'origine peut être de nature culturelle. En raison d'une éducation trop
rigoureuse où le sexe est réprimé et totalement banni, la femme
rejette l'image de son sexe qu'elle associe à des sentiments de honte, de
dégoût et de culpabilité.
L'origine est également fréquemment de nature traumatique. Une première
expérience douloureuse ou mal vécue, des abus sexuels rencontrés dans
l'enfance, ou des agressions sexuelles de toute nature.
Il faut rappeler ici le mode de vie campagnard médiéval, dans lequel toute la famille partage le même lit clos, ce qui n'est pas sans favoriser certains rapprochements...
En résumé :
Syndrome de Klinefelter
On peut écarter cette pathologie, dans la mesure où l'on décrit suffisamment Jeanne comme une femme. Les divers examens qu'elle a subis sont clairs à ce sujet !
Syndrome de Mayer-Rokitanski-Küster-Hauser
Le médecin qui l'examine parle de l'étroitesse, et non de l'absence de profondeur de son vagin ! il parait ainsi pénétrable assez profondément ( " palpée entre les reins " ), ce qui nous fait abandonner là aussi cette éventualité.
Syndrome de Turner
Là encore, on peut écarter cette hypothèse, dans la mesure où Jeanne avait une taille normale, voire même une taille bien supérieure à la moyenne de l'époque ( selon diverses études, dont celle d'Adrien Harmant, elle mesurait entre 1,59 et 1,62 mètre ), et ne semblait pas souffrir de troubles cardiopathiques.
Il semble que le calcul d'Harmant prenant en compte le métré de tissu utilisé pour confectionner une robe à Jeanne omette un détail... Le vêtement en question étant garni en partie basse d'une bande de fourrure, la taille de Jeanne serait augmentée d'autant et serait donc comprise entre 1.72 et 1.75 mètre.
Vaginisme
On peut retenir cette hypothèse comme possible, qui ne constitue en fait qu'un problème plus psychologique que physique ; on peut envisager le traumatisme de cette jeune femme si on l'avait soumise à un examen aussi intime, quasiment en public à chaque fois ! sachant également qu' à son premier " examen " de ce type, elle venait de passer dix jours à cheval, ce qui avait sérieusement endolori les parties concernées de son anatomie... Il avait fallu soigner cette partie intime lors de son arrivée à Chinon...!
Le cavalier du Moyen âge n'est pas assis sur une selle du type employé de nos jours, dite selle anglaise, mais est en fait debout sur les étriers... On peut aisément imaginer les séquelles d'une chevauchée de 600km pratiquée dans de telles conditions !
D'autant plus que l'examen en question sera mené par Yolande d'Anjou, ( la mère de René ), qui avait tout intérêt à affirmer la virginité de sa protégée...
Le test médiéval de virginité se résumant à une ordalie, un jugement de Dieu, il n'était point question d'un quelconque examen physique, telle une palpation du vagin pour y déceler la trace de l'hymen qui l'obstrue partiellement...( Il est bien évident que la contraction du vagin empêchant l'intromission d'un doigt peut laisser croire à la présence de la membrane qui en défend partiellement l'entrée ! )
Il reste néanmoins à expliquer l'aménorrhée dont semble souffrir Jeanne pendant sa campagne.
Et là, une dernière hypothèse peut être envisagée !
Tout d'abord quelques rappels :
- Un jeune homme l'assigne pour rupture
de promesse de mariage, et le tribunal reçoit et instruit la plainte !
Quel fait a conduit ce garçon à s'apercevoir de cette rupture " illicite " ?
Il serait bien étonnant qu'un tribunal ecclésiastique ( l'Officialité de Toul est présidée par l'évêque ) poursuive une jeune fille qui souhaite préserver sa virginité pour une cause religieuse… Et il semble même douteux qu'en cette époque de grande religiosité, un garçon aurait même pu envisager de l'assigner pour cette cause ! - Par contre, le motif
serait parfaitement recevable si le prétendu en question s'était aperçu
de
" l'infidélité " de sa promise, la découvrant un beau jour dans les
bras... d'un beau chevalier ! par ailleurs déjà marié lui même !
Pourquoi pas dans les bras de... René d'Anjou, un de ses initiateurs ?
De plus, il semblerait que cet épisode de l'histoire se situe alors que Jeanne se trouve, seule, du moins sans ses parents, hébergée à l'auberge de la Rousse à Neufchâteau !
Qu'allait-elle y faire ? - Pour certains auteurs, ce jeune homme est mort avant la fin du procès, ce qui également mettait fin à l'action pénale ! on ne sait d'ailleurs pas de quelle façon ; peut être en savait-il un peu trop sur les prouesses de notre héroïne... Curieux non ?
- Les minutes de ce procès devant l'officialité de Toul se trouvent, après leur transfert, dans les archives de l'évêché des Vosges, à St Dié. L'accès en est impossible. Pourquoi ?
- Au départ de sa chevauchée, Jeanne ressemble à un " page ", c'est-à-dire à un jeune garçon. Plus tard, Jean d'Aulon évoquera la beauté de sa poitrine ! le Duc d'Alençon de même...
- A certaines périodes, elle ne quittera pas son armure pendant une semaine. Il faut de bonnes raisons à cela, sachant que tous les besoins se font dans l'armure. On peut aisément imaginer la gêne endurée !
- Ses compagnons d'armes évoquent leur absence d'attirance sexuelle pour l'héroïne ; même en campagne, alors qu'ils dorment à la " paillade ", tous ensemble, personne ne la désire ! (Du moins à ce qu'ils osent avouer lors d'un procès ecclésiastique)
C'est le célèbre Abbé Choux, conservateur en son temps du Musée Lorrain (Nancy) qui évoque en particulier ce procès, affirmant en avoir pu lire le contenu... Et le trouvant... inintéressant ! on s'en serait douté...
L'hypothèse qui explique tous ces points est celle d'une grossesse de Jeanne !
En effet, son corps se transforme, l'androgyne se féminise ; elle n'a plus ses règles, et souhaitant masquer sa taille qui s'arrondit, elle garde son armure au-delà du raisonnable ( la légende parle d'une semaine sans la quitter ! ), souhaitant dissimuler son état !
Elle devra même changer de cuirasse pendant son épopée ! celle offerte par Charles VII ne devait plus convenir ! Jeanne devait en effet s'y sentir trop à l'étroit... Elle utilisera une armure prise à un ennemi, ce qui semble curieux pour une telle fille de se vêtir en quelque sorte " d'occasion ".
De plus, il est patent que la grossesse diminue, voire supprime, l'émission des phéromones responsables de l'appel sexuel inconscient de la femme… Ses compagnons ne la désirent pas...
Un autre argument plaide en faveur de cette hypothèse ! dans un autre chapitre, nous parlons de la représentation de Jeanne, et citons une statue vraisemblablement en partie authentique de la Pucelle d'Orléans, qui a figuré à la fin du XVe sur le monument du pont des Tourelles à Orléans, et dont une copie se trouve actuellement dans le centre johannique géré par le Conseil Départemental des Vosges à Domremy la Pucelle.
Une statue " bizarre "...
Il faut ajouter qu'on a longtemps préféré mettre à la
place d'honneur, bien en vue du public, un statue quelque peu curieuse,
représentant une jeune femme accroupie sur ses talons, portant pour
tout vêtement ce qu'il est convenu d'appeler une " nuisette ", dévoilant
très largement ses cuisses ! cette statue en marbre est intitulée :
" La Pucelle levée à minuit pour écouter ses Voix "
Sur son socle apparaît une inscription en Hébreu !
Il est patent pour nous qu'on a arbitrairement identifié Jeanne dans cette statue !
Nous allons en fournir la preuve à nos lecteurs...
Nous avons donc recherché l'artiste qui a sculpté cette oeuvre, pour découvrir qu'il s'agit de Lorenzo Bartolini (1777-1850). La sculpture lui fut commandée par Rosa Trivulzio Poldi Pezzoli - dont la famille avait déjà commandé un buste de la Marquise – veuve de son mari Giuseppe Poldi Pezzoli en 1833. La cliente a demandé à l'artiste de représenter sa douleur et son dévouement à Dieu après la mort de son mari.
Lorenzo Bartolini
Bartolini a alors décidé de représenter la femme comme un jeune nu, affalé et les mains jointes sur ses genoux ; signe de prière profonde et pieuse. La bouche est légèrement ouverte et les yeux tournés vers le haut en signe de dévotion profonde. La ligne est sinueuse et harmonique. Il représente exactement le concept de la beauté naturelle, qui pour Bartolini était impératif. L'idée de la pose a été inspirée par un modèle qui se reposait après une séance d'installation.Il y a une autre version au musée de l'Ermitage, une dans le Musée national de l'Azerbaïdjan, et le modèle préparatoire en plâtre au Musée du Palais Pretorio à Prato.
Parmi les différentses versions, on peut constater que certaines sont rigoureusement semblables à l'original, alors que certaines sont légérement " rhabillées "... dont celle de Domremy.
Le modèle exposé à Domremy, la sculpture d'origine, et le détail des mains...
On peut donc légitimement s'interroger quant à la présence sur ce site de cette oeuvre, qui n'a aucun lien avec la geste johannique, tandis que le sous-sol de ce même site renferme bon nombre de statues parfaitement adéquates.
On lira avec intérêt la position officielle du Conseil départemental des Vosges, à travers la prose de Mme Magali Delavenne, ancienne conservatrice du site. (Lire en ligne)
La statue authentique :
Par contre, la statue " authentique " présente quant à elle un profil très particulier ! cette Jeanne en prière affiche un ventre particulièrement ... proéminent... ainsi que des traits du visage empâtés ; c'est certainement là l'explication de cette mise à l'écart.
D'ailleurs la copie exécutée en 1890 pour la cathédrale de Toul par les Etablissements Pierson, Institut Catholique de Vaucouleurs, sur la commande de Mademoiselle Anne-Joséphine Nacquard, va corriger cette incongruité... En comparant les deux statues ci dessous, on s'aperçoit aisément que le copiste a généreusement " gommé " ce ventre proéminent, surtout sur le modèle de gauche ( Cathédrale de Toul ) et réduit de la même façon la lourdeur des traits, en dégonflant les joues et le menton.
La Jeanne de 1890 n'est plus enceinte !
On a également amoindri une autre caractéristique de cette statue: l'original possède de très grandes mains, jointes pour la prière bien évidemment, mais qui laissent apparaître, au niveau des auriculaires, une ouverture pour le moins significative ...
la trace évidente d'une " défloration "!
Nos lecteurs qui envisagent de visiter le Centre d'interprétation Johannique de Domremy pourront se livrer à l'expérience consistant à cadrer l'ouverture des mains ce cette statue... au risque d'en choquer certaines des prudes gardiennes !
Les tailleurs de pierre médiévaux étaient des " compagnons ", quelque peu indépendants des croyances établies et du pouvoir en place, et qui très souvent laissaient dans leurs œuvres un message à la postérité. Leurs croyances n'étaient pas forcément très " orthodoxes ", preuves en sont les symboles " païens " laissés dans la pierre des cathédrales.
A-t-on voulu représenter Jeanne en sainte ou.... enceinte ?
Une autre information...
Notre ami Bernard Gallagher nous informe de l'état de ses recherches à propos du tableau " Un orfèvre dans sa boutique " de Petrus Christus ( un disciple de Van Eyck ) et plus précisément sur un détail du tableau, dans lequel il reconnait René d'Anjou et Jeanne...
Nous ne pouvons qu'approuver son analyse, en y ajoutant nos découvertes. On remarque que les deux protagonistes apparaissent sur un miroir dont le coin est ébréché, et qu'un oiseau s'est posé sur le bras de Jeanne. Le fêle du miroir ne signifiant rien de plus que la rupture de l'hymen, et l'oiseau le sexe " libéré "...
Nous développons l'hypothèse d'une grossesse de Jeanne dans un autre chapitre...